Les sectes

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Délicat pour quelqu’un s’affirmant d’Eglise, tel un prêtre, de réagir face aux dangers de certaines sectes. Risque d’être accusé à son tour de « sectaire », de défenseur des intérêts de l’Eglise menacée par la concurrence.
Pourtant rester immobile serait grave et ne témoignerait pas du message de liberté et d’espérance de l’Evangile.
Il est nécessaire de réagir, mais à la condition de ne pas rester sur une position défensive, en décidant de travailler à faire des jeunes, des êtres debouts.

Lien vers le sketch des Inconnus sur les sectes

Lien vers le sketch des Inconnus sur les sectes

Document 1 : A Noiseux, un animateur se mobilise.

Fernand Strebert est curé à Noiseux, animateur de mouvements d’adultes et de jeunes. Son but est de faire des hommes, des êtres debouts. Ainsi n’a-t-il pas voulu rester indifférent aux dangers d’embrigadement, notamment de jeunes dans une secte. Il a accepté de nous parler de l’action menée.

Une mise en scène progressive.

Non loin d’une petite ville touristique, un château est à occuper. Une association décide d’en faire un centre Européen.Dans les villages environnants des bruits courent, des personnes commencent à s’interroger : on apprend que des hommes et des femmes sont engagés par les nouveaux occupants du château, sans être couverts par la sécurité sociale. Des autochtones constatent que les adeptes de ce groupe religieux se rendent près des collèges, des universités, y repérant les étudiants à la mine défaite et les invitent pour partager un repas : « Viens, nous pouvons t’aider ! ». Dans la région, les adeptes sollicitent la charité publique pour des projets du tiers-monde, dont un en « Inde ».

Ces sources de confusion, le manque de clarté nous inquiétaient. D’autant que leur réelle identité ne figurait pas clairement sur leurs documents.

L’association commença alors à louer des maisons dans la commune. Des ménages s’y établissaient. De ces différents « points d’ancrage » pouvait se diffuser une propagande au niveau des gens, en particulier des pauvres et des jeunes.

« Viens chez nous…. »

« Viens chez nous, tu seras heureux sans devoir faire beaucoup d’efforts, rapidement, tout de suite. »
« Tu aimes les sensations fortes, sans devoir passer par la drogue, l’alcool… Viens chez nous. »
« Tu n’aimes pas te sentir seul, tu aimes que quelqu’un t’écoute, solutionne tes problèmes pour toi, en faisant partie d’une communauté : viens chez nous. »

« Tu aimes les voyages, tu aimes découvrir des pays lointains, mais tu es coincé par l’argent : viens chez nous, nous faisons partie d’une grande communauté avec des implantations en Inde, en France, en Espagne : tu pourras y aller gratuitement. »
« Tu es sans travail, chômeur, et pourtant tu as des capacités et elles ne peuvent pas être exploitées car la société ne veut pas de toi : chez nous, tout le monde est considéré ; dans notre grande communauté ; chaque don, chaque atout, chaque qualité personnelle est valorisée ».
« Tu sais qu’au niveau santé, l’alcool, les viandes, le tabac, etc. sont nocifs : viens chez nous, la nourriture est saine. Tu te sentiras beaucoup mieux dans ta peau en mangeant de la nourriture équilibrée. »
« L’environnement, tu ne veux pas qu’on le détruise et pourtant que d’engrais sur les terres, que de bêtes : chez nous, on respecte la nature. Dans notre grande communauté, on cultive soi-même ses produits. »
« Tu aimes partager ou donner aux autres, gratuitement aussi. Chez nous, on a l’occasion de donner beaucoup aux pauvres pour manger, aux sans-abris pour se loger. »

Ces propositions, je les ai recueillies auprès d’une fille prête à entrer dans une secte. Celles-ci constituent le premier contact pris par un adepte de cette secte ou d’une secte en général.

Ne pas en faire un cas à part.

Notre lutte a été menée sur les sectes en général et non sur cette association en particulier. Les manières de faire sont similaires : au premier contact, on fait miroiter que dans le monde, tout va mal ; tandis que dans la secte, tout va se solutionner tout de suite, sans efforts, avec un plus être qui ne cesse de multiplier.

Une action organisée.

Assez rapidement, après l’arrivée remarquée de cette secte, j’ai été sollicité par un instituteur qui avait pris le temps de se rendre compte de ce qui se passait, ainsi que par un conseiller communal. Ils m’ont contacté parce qu’il savait que je travaillais avec les jeunes. Ainsi s’est formé un comité de trois personnes. Nous avons décidé de nous mobiliser parce que nous ressentions un réel danger pour la région.

Le gourou voulait faire de notre village le centre Européen de la secte. Un vaste projet de construction était dessiné. Une demande de permis de bâtir avait été introduite. Nous avions peur pour le patrimoine local ; peur que le projet ne déborde pas sur le village lui-même ; peur que le nombre de personnes, l’argent en jeu, ne changent l’aspect d’une région.

Nous avons aussi ressenti le danger pour la population de jeunes de s’y faire embrigader.

Nous avions peur qu’une philosophie et une manière de faire se répande dans la région : une philosophie contraire au principe de rendre l’Homme autonome, pleinement responsable, debout ! (l’opposé de la philosophie des mouvements d’éducation permanente tels que JRC, ACRF, … dont je m’occupe !)

Informer la population.

Notre premier objectif était d’informer la population : nous voulions que si des personnes entrent dans cette « association », qu’elles le fassent en connaissance de cause. Nous ne voulions pas à notre tour penser pour d’autres, pour les jeunes, mais leur donner la possibilité de faire un réel choix.

Nous avons acheté, dans différents journaux régionaux, l’espace d’une page pour faire paraître un texte invitant les lecteurs à réfléchir à cette question, à dépasser des « impressions » telles que : « Ils sont quand même bien ces gens-là : ils ne fument pas, ne boivent pas, n’ont pas une vie sexuelle débauchée. Ils prient tous les jours, ils sont propres. Ils ont l’air heureux. Ils accueillent tout le monde. »

Nous avons demandé à des centaines de personnes de signer cet article. Ainsi étaient-elles associées à notre démarche. La population pouvait alors se rendre compte que cette réaction n’était pas celle de trois personnes en manque d’action et d’occupation. Notre comité s’est alors élargi à des professeurs de religion, des conseillers communaux, des instituteurs, des juristes, …)

Quand cet article a été publié, les journalistes ont commencé à faire des commentaires. L’association a réagi.

Pour nous expliquer, nous avions intérêt à bien connaître le dossier ! Nous avions récolté une série de faits indiscutables, avec notamment l’aide de l’ADIF.

Plutôt construire que rester sur la défensive.

Quand nous avons constaté que la population avait l’œil (ce qui était notre objectif), que les sectes avaient été interpellées, nous avons décidé alors d’agir au niveau global en construisant, plutôt qu’en étant contre… J’ai continué mon travail d’animation avec les jeunes pour en faire des Hommes, des êtres debouts, pour leur permettre d’être libres, pas dans le sens de faire « ce que je veux », mais « de vouloir ce que je fais ».

Je suis convaincu que c’est en rendant les gens responsables, éveillés, critiques qu’ils pourront réagir.