Les travaux et les jours en Grèce antique

posted in: Histoire | 0

La vie quotidienne diffère peu d’une cité à l’autre, mais c’est Athènes qui est la mieux connu grâce à ses écrivains et à ses vestiges archéologiques. Sparte est la principale exception : La vie des habitants y est entièrement réglée par la cité et a été étudiée dans la séquence « La Grèce des cités. »

  1. La vie économique.
  2. Les conditions naturelles.

Les cités grecques sont dispersées sur un territoire très étendu : la Grèce continentale et les îles proches mais aussi la côte d’Asie mineure, la Grande Grèce, jusqu’en Méditerranée occidentale. La Grèce continentale montre un relief accidenté où quelques hauts sommets, le Mont Olympe (2917 m) et le Mont Parnasse (2457 m), dominent des chaînes montagneuses de taille moyenne séparant les étroites plaines côtières. Les fleuves sont peu importants. Le sol, souvent mal arrosé et caillouteux, est peu fertile. Seules la Béotie et la Thessalie, au nord, présentent de grandes plaines où la culture des céréales et l’élevage du gros bétail (chevaux, bovins) se pratiquent sur une large échelle.

Le climat est méditerranéen, avec un été chaud et sec, dur pour l’agriculture céréalière, mais favorable à la vigne et à l’olivier. Les hivers sont doux et assez pluvieux.

Les communications entre ces plaines sont difficiles par voie terrestre à cause du relief et de l’absence de bonnes routes. Elles se font donc principalement par mer, à la bonne saison.

Les côtes, rocheuses et fort découpées, sont parfois très abruptes mais offrent aussi de nombreuses criques. La pêche peut s’y pratiquer de façon très aisée et assure une ressource alimentaire importante. Quelques ports (Le Pirée, Corinthe) se sont établis dans les baies les plus favorables. La situation dans les nombreuses îles est à peu près la même que sur le continent. Ici plus encore qu’en Grèce, lamer fournit une part importante de la nourriture. Les côtes de l’Asie Mineure et de la Grande Grèce sont plus accueillantes mais l’arrière-pays est également montagneux et rude. Le climat est le même partout.

Les conditions naturelles sont donc fort peu favorables à l’agriculture et aux communications entre cités. Comme l’écrit Hérodote : « La Grèce a pour compagne la pauvreté. » (VII, 102).

  1. La vie agricole.

L’agriculture est la ressource principale. C’est la seule activité considérée, jusqu’au IVe siècle av. J-C, comme digne d’un citoyen. La majorité des agriculteurs sont de petits exploitants qui travaillent eux-mêmes la terre avec un ou deux esclaves. Il existe aussi de grands propriétaires qui utilisent exclusivement la main-d’œuvre servile. La plupart des paysans produisent ce qui est nécessaire pour nourrir leur famille. Les surplus éventuels sont vendus au marché local : animaux, légumes, miel… La plupart des villages vivent en autarcie et ne produisent pas assez pour nourrir les villes. C’est le cas de l’Attique qui importe du blé pour nourrir sa population urbaine.

Les productions principales sont les céréales (blé, orge), les légumineuses (fèves, pois), les olives, les figues et la vigne. On élève des porcs, chèvres, moutons, bovins, chevaux. La production de miel est importante car c’est le seul « sucre » connu.

Les instruments sont rudimentaires, le plus souvent en bois, renforcés parfois de métal : houe, araire, faucille. On pratique l’assolement biennal : une année de culture, une année de repos pour la terre.

  1. L’artisanat et le commerce.

L’artisanat est une activité surtout urbaine. Les artisans se recrutent parmi les citoyens pauvres mais surtout parmi les métèques et les nombreux esclaves. Les artisans ne sont pas tout à fait libres aux yeux des Grecs, parce que le revenu de leur travail dépend de clients potentiels. Ils fournissent les objets (chaussures, armes, instruments de musique, mobilier) et les services (coiffeurs, barbiers) nécessaires à la vie de la cité. Les plus nombreux sont les potiers qui, à Athènes, sont rassemblés dans le quartier du Céramique. Ils produisent des vases vendus dans toute la Méditerranée. Certains sont de grands artistes qui signent leurs œuvres. La plupart fabriquent la vaisselle courante.

Les artisans vendent directement leurs productions dans leurs boutiques ou sur les marchés. Les salaires semblent équivalents pour les artisans libres et les esclaves de même métier mais, pour ces derniers, le maître touche sans doute une commission.

Dans les mines d’argent du Laurion, affermées par l’Etat à des exploitants privés, de très nombreux esclaves travaillent dans des conditions fort pénibles, insalubres et dangereuses. Ces mines fournissent à Athènes le métal précieux qui lui permet de battre sa célèbre monnaie, la drachme d’argent, qui sera le moyen de paiement le plus répandu en Méditerranée aux Ve et IVe siècles av. J-C. Des carrières du Pentélique sont extraits les marbres nécessaires à la construction des temps et des monuments athéniens. Les plus belles pierres sont réservées aux sculpteurs.

Les Grecs pratiquent aussi le commerce à longue distance. Le Pirée, le port d’Athènes, est le grand centre du trafic international. Au moment de sa grande puissance (au Ve siècle av. J-C), Athènes y draine, grâce à sa flotte, des produits venus de tout le monde connu : blé, bois, matières précieuses… et en exporte aussi sa production de céramique, de vin, d’huile…

  1. La vie familiale.
  2. La famille.

La famille, de citoyens ou de métèques, se compose du père, de la mère et de leurs enfants. Elle a à son service un ou plusieurs esclaves domestiques.

Le citoyen reçoit un nom, suivi de ceux de son père et du dème où il est inscrit, par exemple : Xénophon, fils de Gryllos, du dème de Erchia.

L’homme est le chef de famille. Il a le droit de reconnaître ou d’exposer les enfants nouveau-nés. S’il est citoyen, il participe à la vie publique. L’essentiel de ses occupations se trouve hors de la maison : travail, loisirs, réunions, fêtes religieuses, flâneries à l’Agora… La vie « mondaine » est réservée aux hommes qui se reçoivent entre eux. Les seules femmes présentes sont des esclaves ou des étrangères : danseuses, musiciennes, courtisanes.

La femme vit sous l’autorité de l’homme. Elle reste chez elle (au gynécée) sauf pour quelques fêtes religieuses qui lui sont réservées. Elle s’occupe du ménage et élève ses enfants. Seules les plus pauvres, surtout les métèques, ont une activité extérieure (petit commerce, artisanat).

  1. L’éducation.

Les enfants sont élevés par leur mère au gynécée jusqu’à 7 ans. Très tôt les garçons pauvres travaillent avec leur père. Les filles restent auprès de leur mère qui les éduque jusqu’au mariage (à partir de 15 ans).

Si les parents ont les moyens de payer le maître, ce qui est le cas d’une petite élite, les garçons peuvent aller à l’école à partir de 7 ans, accompagnés d’un esclave (pédagogue). L’enseignement est privé. Ils apprennent à lire, à écrire, à compter, à jouer de la musique (cithare). Ils s’imprègnent de légendes et de la mythologie en répétant par cœur et en recopiant les poèmes d’Homère et d’Hésiode qui sont la base de la culture grecque.

Les adolescents qui en ont les moyens complètent leur éducation au gymnase par des cours d’éloquence, de musique, de philosophie et par des exercices physiques. Les plus riches peuvent aussi s’offrir les leçons d’un philosophe réputé (Socrate, Platon et Aristote sont les plus célèbres). A partir de 18 ans, les jeunes gens (éphèbes) pratiquent pendant deux ans l’entraînement militaire qui en fera des citoyens-soldats.

Ce système familial et éducatif est celui d’Athènes. Il est valable sans beaucoup de modifications pour la plupart des cités grecques sauf Sparte où l’éducation, liée au statut de citoyen, est entièrement prise en charge par la cité (voir La Grèce des cités).

  1. La vie de tous les jours.

Les villes grecques anciennes, comme Athènes, ont été construites sans plan directeur. Les rues sont sinueuses et étroites. Des magistrats veillent à la propreté de la voirie et des marchés.

Les maisons sont en général petites, surtout dans les quartiers populaires. Il y en a de plus spacieuses dans les quartiers extérieurs ou à la campagne. Il existe aussi en ville, des immeubles de rapport, peu importants, où l’on loue des appartements exigus et sans confort. Les maisons sont construites en vois, en briques crues ou en torchis. Elles s’ouvrent sur une cour intérieure. Les fenêtres donnant sur la rue sont petites et rares. Les maisons individuelles ont souvent un étage réservé aux femmes (gynécée) ou un appartement loué auquel on accède par un escalier extérieur. Les toits sont couverts de tuiles ou en terrasses. La plupart des maisons n’ont pas de cheminée ni même de cuisine : on se chauffe avec un brasero et on cuisine dehors. Les grandes maisons sont mieux équipées (cuisine, salle de bains) mais l’eau courante n’existe pas. On s’approvisionne aux fontaines, travail pénible réservé aux esclaves. L’équipement sanitaire déficient est responsable d’un manque d’hygiène flagrant, favorable au développement des maladies et des épidémies (ainsi la peste, à Athènes, en 429 av. J-C, dont mourut Périclès).

Le mobilier est rudimentaire : quelques tables, chaises, tabourets, lits et coffres, des couvertures mais pas de draps. Quelques lampes à huile dispensent un éclairage médiocre et enfumé. La décoration des maisons riches comprend des poteries, des mosaïques, des fresques à partir du IVe siècle. La vaisselle est en céramique plus ou moins richement ornée ou en bois avec quelques ustensiles en fer. On manie des couteaux et des cuillers, pas de fourchettes.

La nourriture est frugale. Les céréales (orge, froment), consommées en galettes ou en pain, sont accompagnées d’oignons, d’olives, de fèves ou de pois chiches, parfois de poisson, rarement de viande. On mange aussi des fruits : figues, raisins, noix et on sucre avec du miel. Les boissons courantes sont l’eau et le vin coupé d’eau, souvent aromatisé.

Les repas sont simples, et le seul important est le dîner qui se prend après la tombée de la nuit. Les Grecs mangent couchés sur des lits, le torse soutenu par des coussins. Les riches oisifs transforment parfois ce dîner en un banquet entre hommes, suivi d’une réunion qui mêle distractions et beuveries (symposium).

  1. Le rythme de la vie.

La vie des Grecs se déroule selon un rythme très différent du nôtre.

L’année se divise en 12 mois lunaires de 29 ou 30 jours. On y ajoute un mois supplémentaire certaines années pour adapter l’année solaire er l’année lunaire mais le système varie d’une cité à l’autre. On désigne l’année du nom d’un magistrat (archonte à Athènes, éphore à Sparte). Dans les documents officiels, on n’utilise jamais les Olympiades pour indiquer une date. Ce mode de datation sera utilisé tardivement dans les textes littéraires.

Le mois est le plus souvent divisé en décades. Il n’y a pas de jour de repos officiel et régulier comme notre dimanche. De très nombreuses fêtes religieuses éparpillées tout au long de l’année interrompent les périodes de travail.

La journée est divisée en périodes plus ou moins précises : l’aube, l’après-midi… Le meilleur moyen de connaître l’heure est le cadran solaire. Les clepsydres (ou horloges à eau), comme nos sabliers, ne servent qu’à mesurer de courtes durées comme le temps de parole à l’Assemblée ou au tribunal. Les Grecs se soucient peu de savoir l’heure, ils ne sont pas pressés par le temps.

In Racines du Futur, Tome 1, Hatier, Bruxelles, 1991, pp 30-37.