Les différents types de responsabilité
(1) X est responsable d’avoir confié son pit-bull à Y. (2) A première vue, Y est une personne responsable. (3) En acceptant de garder le pit-bull, Y a pris certaines responsabilités. (4) Le pit-bull mord Z. La morsure est responsable d’une dangereuse infection. (5) X est responsable du dommage subi par Z. (6) Y se sent responsable.
Que veut-on dire par « responsabilité » et « responsable » dans les différents cas évoqués dans ce texte ? Il ne s’agit pas chaque fois de la même responsabilité.
- X est responsable d’avoir prêté son pit-bull à Y :
- A première vue, Y est une personne responsable :
- En acceptant de garder le pit-bull, Y a pris certaines responsabilités :
- Le pit-bull mord Z. La morsure est responsable d’une dangereuse infection :
- X est responsable du dommage subi par Z :
- Y se sent responsable :
Responsabilité civile, morale et pénale
Il arrive que l’on ne sache plus très bien ce que l’on entend par responsabilité civile, pénale ou morale. Nous allons essayer d’y voir un peu plus clair…
Voici les définitions de ces responsabilités. Lis les attentivement et essaie de voir, en faisant le lien avec le texte vu juste avant, si pour X et Y, il s’agit de responsabilité civile, pénale ou morale. Trouve un exemple pour chaque responsabilité.
Responsabilité civile :
Voici les définitions de ces responsabilités. Lis les attentivement et essaie de voir, en faisant le lien avec le texte vu juste avant, si pour X et Y, il s’agit de responsabilité civile, pénale ou morale. Trouve un exemple pour chaque responsabilité.
Obligation de réparer le préjudice causé à autrui par l’inexécution d’un contrat ou toute action dommageable commise par soi-même, par une personne qui dépend de soi, ou par une chose qu’on a sous sa garde.
Responsabilité pénale :
Obligation pour une personne morale ou physique de supporter la peine prévue pour l’infraction qu’elle a commise.
Responsabilité morale :
Etre moralement responsable, c’est lorsqu’en conscience, on se reconnaît auteur de ses actes. En ce cas, on doit répondre de ses actes en son « for intérieur », c’est-à-dire devant le tribunal intime de sa conscience. Elle implique la connaissance des valeurs (être capable de discerner le bien et le mal) et la liberté.
Etre responsable signifie : « être la cause de ». Mais peut-on être responsable des actes que nous n’avons pas engagés volontairement ou consciemment ?
Par RUWEN OGIEN
philosophe français
Etre responsable signifie : « être la cause de ». Mais peut-on être responsable des actes que nous n’avons pas engagés volontairement ou consciemment ?
eux qui cherchent du côté de la philosophie quelques clartés sur le sujet de la responsabilité risquent d’être déçus. A la lumière des réflexions philosophiques, il n’est pas impossible de conclure que nous sommes en un sens, responsables de tous et de tout et, en un autre sens, de personne et de rien. Autrement dit, notre responsabilité serait à la fois illimitée et inexistante. Evidemment, ce type de conclusion ne peut pas être d’un grand secours lorsque nous voulons donner une direction à nos jugements (moraux ou autres) dans toutes sortes de cas difficiles et embrassants : des crimes de guerre aux négligences des pouvoirs publics en matière de santé, en passant par des problèmes un peu moins scandaleux mais non moins difficiles (ceux qui concernent par exemple, les dommages causés par les animaux domestiques, les immeubles en ruine, les avalanches, les explosions d’avion en plein vol, etc.)
(…)
Le slogan « Responsable de tout et de rien » est-il le dernier mot de la philosophie sur la question de la responsabilité ? Et, d’abord, qu’est-ce qui le justifie ? Le recensement des différentes significations des termes « responsable » et « responsabilité » semble établir qu’il n’y a pas d’identité conceptuelle ou, pour être plus précis, pas de relation analytique entre être responsable et être l’auteur, la source ou l’agent conscient ou volontaire d’une action, en ce sens qu’on ne se contredit pas nécessairement lorsqu affirme, par exemple : X est responsable d’un certain état de choses mais il n’est pas l’agent conscient ou volontaire de cet état de choses.
En réalité, rien n’exclut, dans l’état actuel de notre langage qu’on juge quelqu’un responsable de ce qui ne dépend pas de lui, quelles que soient nos réserves à l’égard du caractère juste ou rationnel de ce genre de jugement. C’est pourquoi personne ne devrait crier au scandale sémantique devant des énoncés tels que « X est responsable de son caractère » (surtout s’il est déplorable : la cruauté ou l’avarice ne sont pas considérées comme de bonnes excuses, des traits de caractère pour lesquels on ne peut pas être jugé) ; ou « X est responsable de ses croyances » (là encore la responsabilité semble plus évidente pour les croyances stupides ou scandaleuses, celles du jeune hitlérien par exemple, que pour celles qui ne paraissent pas particulièrement révoltantes). Pourtant, le caractère et les croyances sont précisément des choses qui ne dépendent pas clairement de nous. Même si nous abandonnons le point de vue étroitement sémantique, il y a des raisons de dissocier « être responsable » et « être agent conscient et volontaire ».
Ainsi, il ne semble pas qu’il soit irrationnel de reconnaître une sorte de responsabilité collective à l’égard des actions passées ou présentes de ses proches, parents, ancêtres, alliés… Si nous acceptons d’hériter des bonnes choses (titres, fortune, patrimoine, etc.), sommes-nous en droit de rejeter l’héritage des mauvaises (entre autres, les crimes coloniaux, les guerres, l’exploitation qui ont permis la constitution du patrimoine) ?
Enfin, toutes sortes d’arguments tendent à montrer qu’à côté de la responsabilité positive, celle que nous avons à l’égard des choses que nous faisons, nous pouvons admettre l’existence d’une responsabilité négative, celle que nous avons à l’égard de ce que nous laissons faire. Ce sont les philosophes utilitaristes qui défendent le plus énergiquement l’idée que, du point de vue moral, il n’y a aucune différence significative entre faire et laisser faire, entre tuer et laisser mourir, entre exploiter ou affamer et ne pas faire tout ce qui est en notre pouvoir pour éviter l’exploitation, la famine ou la misère, etc.
u total, l’absence d’identité conceptuelle entre « être responsable » et « être l’agent conscient ou volontaire d’une action » justifie, en grande partie, l’idée que notre responsabilité pourrait bien être limitée en ces différents sens. D’un autre côté, il s’est toujours trouvé des philosophes (depuis Aristote au moins) pour soutenir qu’il était injuste ou irrationnel d’imputer à qui que ce soit une responsabilité pour autre chose que ses actions conscientes et volontaires, c’est-à-dire pour autre chose que ce qui dépend de lui. Toute la question, bien sûr, est de savoir s’il existe des critères décisifs pour distinguer ce qui dépend de nous et ce qui n’en dépend (ou entre ce que nous faisons et ce qui nous arrive). Or, c’est précisément l’idée qu’il serait possible de trouver des critères de ce genre que les défenseurs de la responsabilité illimitée semblent exclure. D’après eux, il est absurde d’opposer l’illusion de la responsabilité personnelle à l’égard de ses actions pour nier la valeur morale des responsabilités collectives ou négatives.
Mais la cohérence de l’idée de responsabilité illimitée (collective, négative…) et l’incohérence de l’idée de responsabilité personnelle sont loin d’être établies. On peut contester la valeur de l’idée de responsabilité illimitée en objectant, entre autres, qu’elle vide nos conceptions morales de tout contenu « motivationnel » (ou de toute efficacité) parce qu’elles sont trop exigeantes ou parfaitement irréalistes. C’est particulièrement évident dans le cas de la responsabilité négative, qui, si elle était acceptée, pourrait nous amener à condamner absolument notre tendance à consacrer plus de ressources matérielles ou affectives à nos propres enfants qu’à ceux d’une personne avec qui nous n’avons jamais eu de relations personnelles. D’autre part, même si les défenseurs de l’idée de responsabilité illimitée n’ont pas tord de dire qu’il n’y a pas de critère décisif pour distinguer ce que nous faisons et ce qui nous arrive, il n’en résulte pas que cette distinction soit absurde ou illusoire. C’est au fameux juge américain Oliver Wendell Holmes que nous devons cette remarque un peu plate mais qui ne manque pas de bon sens : « même un chien sait faire la différence entre le coup de pied volontaire et celui de l’homme qui trébuche sur lui. » Mais, en homme avisé, le juge Holmes n’aurait certainement pas exigé des chiens qu’ils apportent une justification rationnelle à cette distinction (qu’ils font, d’après lui, naturellement). Or c’est précisément parce que nous exigeons une justification rationnelle à la distinction entre ce que nous faisons et ce qui nous arrive, entre ce qui dépend de nous et ce qui n’en dépend pas, que nous sommes, pour ainsi dire, dans le pétrin. Mais, à supposer qu’il soit exclu que nous puissions trouver des critères évidents et décisifs à partir desquels la distinction la distinction pourrait être fondée, serions-nous pour autant dans l’obligation « rationnelle » d’y renoncer ? Probablement pas. S’il fallait renoncer à toutes les distinctions pour lesquelles nous n’avons (et n’aurons) pas de critères évidents ou décisifs, ce sont pratiquement toutes les distinctions qui nous importent (entre les faits et les valeurs, la raison et l’expérience, les fins et les moyens, par exemple) qu’il faudrait jeter aux orties.
Finalement, c’est parce que l’idée de responsabilité illimitée n’est pas si cohérente et parce que l’idée de la responsabilité pour ses propres actions n’est pas si incohérente que le slogan « Responsable de tout et de rien » ne peut pas être le dernier mot du philosophe sur la question de la responsabilité, même s’il est devenu assez courant pour des raisons qui, au fond, m’échappent complètement.
- Quelle est la différence entre la responsabilité positive et la responsabilité négative ?
- Qu’entend-on par responsabilité collective ?
- Quelle est l’idée prônée par les philosophes utilitaristes ? Es-tu d’accord avec cette idée ?