La temporalité, c’est-à-dire la façon dont nous ressentons et expliquons la date et la durée des événements, s’exprime de deux façons :
– Les temps verbaux situent l’action, la définissent par rapport à une origine.
– Les aspects verbaux caractérisent l’action, la définissent par rapport à sa réalisation.
1. Structures générales
1.1 Les temps verbaux
Les événements peuvent être situés par rapport à une double origine : par rapport au moment de la parole (ou énonciation), ou par rapport à un autre événement, déjà daté.
– Hier, je suis allé au cinéma. (Evénement situé par rapport au présent [« aujourd’hui » : moment de l’énonciation]).
– Ce jour-là,il sortit avec des amis pour aller au cinéma. (« Ce jour-là » : moment distinct de l’énonciation présente, mais relié à celle-ci).
– Quand j’aurai terminé mon travail, j’irai au cinéma. (Evénement [« j’aurais terminé »] situé en fonction d’un autre événement [« j’irai »], lui-même daté par rapport à l’énonciation présente).
On peut donc distinguer deux groupes temporels :
1.3. Les aspects verbaux
Une action peut être réalisée de plusieurs façons et être ainsi exprimée sous différents aspects. L’aspect traduit le déroulement de l’action :
– Son commencement : aspect inchoatif.
– Sa durée : aspect duratif.
– Sa fin : aspect accompli.
L’aspect inchoatif s’exprime par :
– Des périphrases : commencer à… se mettre à…
– Des formes pronominales : s’endormir, s’éveiller…
L’aspect duratif s’exprime par :
– Des périphrases : être en train de… , de continuer de…
– L’emploi de verbes qui comportent une idée de durée ou de répétition (selon les contextes) : grandir, progresser, refaire, répéter, etc.
– L’emploi de l’imparfait (selon les contextes).
– L’usage d’adverbes ou de locutions temporelles (toujours, encore, depuis longtemps, etc.).
L’aspect accompli s’exprime par :
– Les formes composées des verbes : j’ai chanté (aspect accompli), par opposition à : je chante (aspect inaccompli).
– Des périphrases : venir de… , finir de… .
2. Structures particulières
2.1. Les formes verbales : valeurs propres.
Les formes verbales, simples ou composées, possèdent les valeurs temporelles et aspectuelles qui viennent d’être définies. Elles expriment, à l’indicatif, un temps absolu ou relatif, un aspect accompli ou inaccompli.
2.2. Les formes verbales : valeurs transposées
A côté de leurs valeurs propres, les formes verbales possèdent des valeurs transposées (ou figurées) : dans certains types d’énoncés, un temps peut être employé à la place d’un autre, notamment pour produire un effet stylistique.
– Dans l’expression des faits historiques : le présent, le futur ou même le passé composé peuvent être employés avec une valeur de passé simple.
– En mai 1429, Jeanne d’Arc délivre Orléans; peu après, elle fait sacrer le roi à Reims. (Présents historiques [ou de narration]).
– Jeanne d’Arc délivra Orléans en 1429. Deux ans plus tard, elle mourra sur le bûcher à Rouan. (Futur d’anticipation historique).
– Jeanne d’Arc a délivré Orléans en 1429. (Passé composé historique).
– Dans l’expression des vérités générales ou permanentes : le passé simple ou le passé composé peuvent être employés avec une valeur de présent.
– Qui ne sait se borner, ne sut jamais écrire (Boileau).
– De tout temps, les petits ont pâti des sottises des grands. (La Fontaine).
– Dans l’expression de la proximité temporelle : le présent ou le passé composé se substituent au futur et au futur antérieur, pour rendre le futur proche; le présent peut aussi prendre une valeur de passé récent.
– Attends-moi ! J’arrive dans deux minutes. (Présent de futur proche).
– Attends-moi ! J’ai fini dans une minute. (Passé composé de futur proche).
– Tu tombes bien ! J’arrive à l’instant de Paris. (Présent de passé récent).
– Dans l’expression de l’affirmation atténuée : l’imparfait, le plus-que-parfait ou le futur sont employés avec des valeurs de présent (nuances de la politesse, du conseil ou de l’ordre).
– Excusez-moi ! Je venais / J’étais venu vous demander de me prêter un livre. (Nuance de politesse).
– Si vous le voulez bien, je vous demanderai de fermer cette porte. (Nuance d’ordre).
Pagès, Pagès-Pindon, Le Français au lycée, Nathan, Paris, 1984, pp. 68-72