Le fonctionnement de la narration

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La mise en œuvre de la narration se manifeste particulièrement dans les trois questions suivantes : 

  • La question du temps: à quel rythme se situe la narration par rapport à l’histoire racontée et à quel rythme se fait le récit des événements ?
  • La question du narrateur: qui parle, qui raconte l’histoire ?
  • La question du point de vue: comment les faits sont-ils connus et d’où vient le regard porté sur les êtres et les choses ?

Cette dernière question (qui voit ?) rencontre sur certains points la question du narrateur (qui parle.) mais ne se confond pas avec elle.

Le temps.

Ordre de la narration.

L’acte narratif peut se situer après, pendant ou avant l’histoire racontée, et il peut même s’intercaler entre les moments de l’action. Chaque type de narration se caractérise par le choix de temps verbaux spécifiques :

Narration ultérieure : le récit rapporte des événements passés et se situe après leur accomplissement. Les temps utilisés sont ceux de l’histoire (passé simple, imparfait, plus-que-parfait). C’est le type de narration le plus largement répandu. On peut aussi trouver des passages de discours à côté du récit des faits passés. Cette mise en relation du présent avec le passé fait apparaître le moment de la narration : il s’agit souvent d’un récit à la première personne, dans lequel les phrases de discours constituent le commentaire du narrateur sur les faits rapportés.

Narration simultanée : le récit des événements se fait au fur et à mesure qu’ils se produisent. Les temps employés sont ceux du discours. L’exemple le plus fréquent est le monologue intérieur : les événements sont notés pour le retentissement qu’ils ont dans la conscience du narrateur.

Narration antérieure : les événements racontés ne se sont pas encore produits au moment de la narration. Le récit se fait normalement au futur, mais la vision peut aussi s’énoncer au présent. Le récit de ce type, prédictif ou prophétique, reste exceptionnel dans la littérature.

Narration intercalée : le moment de la narration se déplace, puisque le récit se situe dans les intervalles qui séparent les différents moments de l’action. On trouve alors des temps du passé et des temps du présent. Il s’agit d’un discours, ou d’un mélange d’histoire et de discours. L’exemple le plus courant est le roman par lettres ou le journal.

Rythme de la narration.

Il naît du rapport entre la durée de l’histoire et la durée de la narration, celle-ci se définissant par la longueur du texte consacré à tel ou tel épisode.

S’il est théoriquement possible d’imaginer que ce rapport reste constant, dans la pratique, les accélérations ou ralentissements sont des éléments constitutifs de la narration. Les variations du rythme sont essentiellement :

La pause : le temps de la narration ne correspond à aucun moment de l’histoire. C’est le cas des descriptions, des réflexions générales.

L’ellipse : c’est l’omission par la narration de toute une période de l’histoire. Une des variantes fréquentes de l’ellipse est le résumé, qui condense une longue période en une phrase.

Le point de vue (ou focalisation).

On appelle focalisation le procédé qui consiste à présenter un objet en précisant d’où et comment cet objet est connu, c’est-à-dire quel est le foyer à l’origine de la perception.

La question du point de vue se manifeste dans le rapport entre le narrateur et l’univers représenté. Il existe trois catégories de focalisation :

Focalisation zéro : il est impossible de préciser d’où la réalité décrite est vue, car elle est présentée sous plusieurs angles à la fois. La connaissance de cette réalité n’est bornée par aucune limite : il y a multiplicité de foyers. On parle alors de narrateur omniscient (ou auteur omniscient) : celui-ci a le point de vue de Dieu, il voit tout et il sait tout.

Narrateur > personnage (le narrateur en dit plus que n’en sait aucun des personnages.

Focalisation interne : le foyer est placé dans un personnage témoin ; la réalité présentée se trouve donc limitée par un point de vue particulier et marquée par la subjectivité de la perception.

Narrateur = personnage (le narrateur ne dit que ce que sait le personnage).

Focalisation externe : Le foyer se définit comme extérieur à la réalité décrite. Le texte, dépourvu de toute subjectivité, présente une réalité réduite à ses apparences et que n’éclaire aucune interprétation.       Narrateur < personnage (le narrateur en dit moins que n’en sait le personnage).

 Pagès, Pagès-Pindon, Le Français au lycée, Nathan, Paris, 1984, pp. 124-127