Je veux cependant que vous sachiez que Christ est le chef de tout homme, que l’homme est le chef de la femme, et que Dieu est le chef de Christ. Tout homme qui prie ou qui prophétise, la tête couverte, déshonore son chef. Toute femme, au contraire, qui prie ou qui prophétise, la tête non voilée, déshonore son chef, c’est comme si elle était rasée. Car si une femme n’est pas voilée, qu’elle se coupe aussi les cheveux. Or, s’il est honteux pour une femme d’avoir les cheveux coupés ou d’être rasée, qu’elle se voile. L’homme ne doit pas se couvrir la tête, puisqu’il est l’image et la gloire de Dieu, tandis que la femme est la gloire de l’homme. En effet, l’homme n’a pas été tiré de la femme, mais la femme a été tirée de l’homme ; et l’homme n’a pas été créé à cause de la femme, mais la femme a été créée à cause de l’homme. C’est pourquoi la femme, à cause des anges, doit avoir sur la tête une marque de l’autorité dont elle dépend. Toutefois, dans le Seigneur, la femme n’est point sans l’homme, ni l’homme sans la femme. Car, de même que la femme a été tirée de l’homme, de même l’homme existe par la femme, et tout vient de Dieu. Jugez-en vous-mêmes, est-il convenable qu’une femme prie Dieu sans être voilée ? La nature elle-même ne vous enseigne-t-elle pas que c’est une honte pour l’homme de porter de longs cheveux, mais que c’est une gloire pour la femme d’en porter, parce que la chevelure lui a été donnée comme voile ?
Analyse de ce passage :
Il faut premièrement relever qu’il s’agit de la prière dans une assemblée publique. Ce n’est pas le cas de la prière privée, avec d’autres femmes ou sa propre maisonnée.
En fonction des coutumes et des idées qui existaient en Orient à cette époque, le voile était considéré comme un insigne de subordination, et de ne pas le porter voulait dire que la femme n’avait aucun respect pour son mari. Comme actuellement le respect de la femme pour l’homme ne s’affiche plus par les vêtements, la grande majorité de l’Église de Jésus-Christ ne considère plus cette ordonnance paulinienne comme utile aujourd’hui.
Bien qu’on ne puisse pas l’affirmer sans équivoque, la prépondérance de la preuve indique toutefois que c’était, au premier siècle, une coutume universelle pour les femmes de se couvrir la tête en public, aussi bien dans la culture juive que dans la gréco-romaine.
La nature de ce voile variait cependant considérablement mais c’était communément une partie du vêtement extérieur que l’on remontait sur la tête comme un capuchon.
Il semble que le slogan corinthien, « tout m’est permis » avait également été appliqué aux réunions de l’Église, et les Corinthiennes avaient exprimé ce principe en se débarrassant de leur tenue distinctive. Ce qui est plus important, c’est qu’elles semblent avoir aussi rejeté le concept de la subordination dans l’Église (et peut-être aussi dans la société) et en même temps tout symbole culturel (p. ex. le fait de se couvrir la tête) qui aurait pu y être attaché.
Selon Paul, si une femme enlevait son voile, ce n’était pas un acte de libération mais d’avilissement. Elle pourrait tout aussi bien se raser la tête, signe de disgrâce. En agissant ainsi, elle se déshonorait elle-même et déshonorait aussi son chef spirituel, l’homme.
L’homme, d’un autre côté, ne devait pas se couvrir la tête, puisqu’il est l’image et la gloire de Dieu. Paul fonde sa conclusion sur Genèse 1.26, 27. La gloire et l’image de la femme proviennent de celles de l’homme (son mari) (1 Co. 11.8) et lui sont complémentaires (v. 9).
L’homme et la femme, dans une interdépendance mutuelle, se complètent l’un l’autre et glorifient Dieu (cf. 10.31). Ni l’un ni l’autre ne devrait être indépendant ou se croire supérieur à l’autre. La subordination de la femme n’est pas équivalente à une infériorité. Intrinsèquement, l’homme n’est pas supérieur à la femme. Ève est venue d’Adam, mais chaque homme qui naît dans ce monde sort du sein d’une femme (11.12). Dieu les a créés tous les deux, et l’un pour l’autre.
Paul avait fondé son raisonnement précédent pour le maintien du voile comme expression de la subordination de la femme sur des arguments découlant de la révélation divine. Il se tourne maintenant vers la révélation naturelle (cf. Ro. 1.20) pour énoncer un nouvel argument soutenant sa recommandation : l’humanité fait instinctivement la distinction entre les sexes de plusieurs façons, l’une d’entre elles étant la longueur des cheveux. Les exceptions à cette règle générale étaient dues à la nécessité ou à la perversité. Ce n’était pas tellement une longueur de cheveux quelconque que Paul avait à l’esprit que la différenciation entre l’homme et la femme. Les Spartes, par exemple, avaient les cheveux jusqu’aux épaules, et ils les attachaient d’ailleurs pour le combat. Mais, personne ne les trouvait efféminés pour autant.
Les longs cheveux étaient une gloire pour la femme, puisqu’ils exprimaient visiblement la différenciation des sexes. C’est ce que Paul voulait faire ressortir en disant que la chevelure lui avait été donnée comme voile. La révélation naturelle confirmait qu’il était tout à fait convenable pour une femme de porter un voile. Elle avait un voile naturel et devrait garder l’habitude de porter un voile supplémentaire dans les réunions publiques.
Un autre argument de Paul pour le maintien du statu quo à l’égard du port du voile venait de l’habitude de l’Église de l’époque. Paul n’essayait pas d’imposer aux Corinthiens un nouveau comportement, mais simplement de mettre un frein aux abus individuels et complaisants commis au nom de la liberté. Comme dans le cas des viandes sacrifiées aux idoles (8.1-11.1), Paul s’occupe du sujet immédiat, mais met également le doigt sur la source du problème : la recherche de l’intérêt personnel qui n’était pas disposé à se subordonner aux besoins des autres (cf 10.24) ou à la gloire de Dieu (10.31). Le rejet du voile était un acte d’insubordination qui n’honorait pas Dieu.
Les propos de Paul concernant le port du voile sont à replacer dans le contexte du Ier siècle. Le voile de la femme mariée faisait partie des accessoires principaux de sa tenue vestimentaire. Il symbolisait la solidité de l’engagement, la fidélité aux vœux du mariage et sa stabilité. Il était la marque de la modestie féminine. Mais il symbolisait également l’autorité du mari sur son épouse. De ce fait, se dévoiler pouvait signifier vouloir rompre les liens du mariage.
Le fait d’ôter leur voile lors de services religieux aurait assimilé les femmes de l’Église à des femmes légères. En se privant de leurs voiles pour prier et prophétiser à l’occasion de cérémonies religieuses, les femmes mariées donnaient un signal clair de rébellion contre la loi romaine qui exigeait un tel signe extérieur. Les Corinthiennes s’émancipaient, elles ne souhaitaient plus se soumettre à une tradition que les hommes leur avaient peut-être bien imposée.
Paul n’a nullement l’intention d’interdire à la femme l’accès à la prédication et à la prière. Il est en prise directe avec une tradition qui enferme la femme dans des obligations qui n’ont pas grand-chose à voir avec un problème théologique.
Un raisonnement difficile :
Cette marque d’autorité (v. 10) a longtemps été comprise comme étant celle qu’un homme exerce sur sa femme. La Bible Segond de 1975 traduisait par « une marque de l’autorité dont elle dépend ». L’expression « dont elle dépend » ne se trouve pas dans le texte grec. Il convient de traduire simplement par « une marque d’autorité ». Il s’agit ici d’une invitation aux femmes de l’Église de Corinthe de respecter les bonnes manières pour se faire entendre lorsqu’elles prient ou prophétisent.
Aux v. 14-15, Paul fait appel à la nature pour tenter d’apaiser les esprits et montrer que, dans les milieux socioculturels et géographiques où vivent ses destinataires, la femme porte les cheveux longs et l’homme les cheveux courts. La différence qui existe entre l’homme et la femme n’a jamais impliqué une quelconque infériorité ou supériorité. Le voile lors de la prière et de la prédication réunifie l’Église dans une relation d’amour et de respect mutuel.
Ce qui distinguait les femmes dans la société des cités de l’époque devait les distinguer aussi dans la société religieuse.
Actualisation
Nos sociétés ont changé, les femmes ont pris les places que les hommes leur avaient longtemps refusées sans raison autre que leur besoin de domination. Le voile posé sur une tête féminine n’a de nos jours plus de signification. La femme a autant d’autorité que l’homme dans la société et dans l’Église, peu importe qu’elle ait des cheveux longs ou des cheveux courts, qu’elle porte un voile ou non.
Paul a réhabilité les femmes. Elle n’est plus la marchandise, l’esclave ou le jouet des civilisations antiques. Si le souci de Paul, dans son argumentaire difficile à suivre, était de demander à la femme de montrer à l’extérieur une apparence digne de ce qu’elle était à l’intérieur, c’était pour lui faire prendre conscience que, devenue enfant du Christ, elle devait se différencier de ses congénères encore attirées par des valeurs passagères et des mœurs légères. La remarque de Paul concernant la dignité dans les assemblées reste valable aujourd’hui, mais elle l’est tant pour les femmes que pour les hommes.
Lorsque l’homme est un tyran
L’homme et la femme sont des partenaires qui exercent une responsabilité l’un vis-à-vis de l’autre. Ce que l’un fera mal aura des répercussions sur l’autre. Le comportement honteux de l’un (tête découverte pour la prière ou la prédication au Ier siècle à Corinthe) déshonore le partenaire.
Il en va de la relation homme-femme (mari-épouse) comme de la relation Dieu-Christ. L’antériorité de la création de l’homme par rapport à la femme dont Paul parle dans ce texte ne lui octroie aucun droit sur la femme venue ensuite.
Dans notre langage, l’homme fort d’une nation est le dictateur qui gouverne en maître absolu. Il a pu le devenir grâce à un charisme envoûtant ou par la force de ses milices terrorisantes. Ce genre d’individu n’est respecté que parce que son peuple a peur de lui. Gouverner ainsi n’est ni une preuve de sagesse ni une preuve d’intelligence. Il en est de même des relations au sein du couple et au sein de l’Église entre les populations de sexes différents. Celui qui gouverne d’une main de fer le fait pour asseoir son autorité masculine acquise au cours des millénaires au détriment de la gente féminité à laquelle il n’a donné aucune chance de se développer par peur qu’elle fasse aussi bien que lui, voire beaucoup mieux. Le mâle qui veut dominer est un être ambitieux qui se regarde le nombril et qui ne peut plus lever la tête pour contempler la superbe créature que Dieu a placée en face de lui.