Le racisme

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Document 4 : Témoignage du docteur Goude.

Un ancien déporté décrit le camp de Natzweiller, en Alsace, plus connu sous le nom de Struthof, et qui fut aussi un terrible camp d’extermination :
J’y arrivai le 19 mai 1944 avec un groupe de sept intellectuels. A notre entrées, nous fûmes tout de suite impressionnés par nos frères de misère, leurs démarches d’automates, la fixité de leurs regards, leurs aspect squelettique indescriptible et inégalé ailleurs. J’ai connu beaucoup de camps (Buchenwald, Naztweiller, Wesseling, Dachau, Auschwitz), nulle part je n’ai ressenti de pitié plus douloureuse qu’au Struthof. Ce qui nous intrigua dès l’abord, ce furent d’immenses lettres : N.N. barbouillées en rouge sur les vêtements. N.N. veut dire Nacht und Nebel (nuit et brouillard). C’étaient des hommes complètement retranchés du monde civilisé. Ils ne recevaient ni courrier, ni colis, ni nouvelles extérieures. C’était l’abrutissement complet, le travail forcené, la furieuse brutalité des Kapos et des chefs de blocks . Les détenus ne bénéficiaient pas des cinq heures effectives de sommeil. La vermine se chargeait de les troubler. Le repos dominical de l’après-midi était supprimé. Mais, en revanche, la schlague toute la journée, les chiens constamment sur les talons, la hantise de la moindre défaillance, la pitance diminuée, l’absence total au début de soins médicaux, les redoutables expériences dites scientifiques des greffes humaines et des chambres à gaz.
Les détenus étaient occupés en montagne à des travaux de terrassement, sous la menace constante des matraques des kapos. Ces kapos, détenus comme nous, avaient réussi à obtenir du S.S. responsable un emploi privilégié. Ces kapos, pour la plupart étrangers et prisonniers de droit commun, s’acharnaient sans réserve sur leurs compagnons d’infortune. La loi du camp voulait que sa population n’excédât pas un chiffre donné. Le kapo se chargeait de l’exécution d’un certain nombre de détenus en servant servilement les ordres reçus. Il repérait les plus affaiblis et s’acharnait sur eux, à l’aide de gourdins, avec une provocante cruauté. Il arrivait cependant que le résultat cherché n’était pas atteint au moment de la rentrée du camp. Le kapo poussait alors irrésistiblement dans la pente le détenu condamné. Dès que ce pauvre malheureux avait dépassé involontairement la borne fictive du carré du travail, il était abattu par les sentinelles de connivence avec le kapo. Sa fiche portait invariablement comme cause de décès : « Tentative d’évasion »… .
Naztweiller avait la spécialité de creuser des usines souterraines. Les détenus creusaient les tunnels. Je fus envoyé dans un des ces commandos à Wesseling. Le travail durait douze heures consécutives sans manger, le plus souvent accompli pieds nus et dans une humidité inimaginable. J’avais eu le privilège d’être classé sur mon aspect physique « travailleur de force. » Je devais, seul, alimenter en terre ceux qui chargeaient la benne. Comme la cadence réclamée de travail ne pouvait être maintenue, les encouragements arrivaient sous forme de coups de trique. Nous devenions rapidement des automates sans pensée, sans esprit, sans réaction. Au retour du camp, le temps passait en appels interminables et tracassiers. Ce petit camp était privé d’eau. Aussi la plus élémentaire hygiène en était bannie. Nous mangions à six dans une même gamelle sans l’aide de cuiller. Il arrivait fréquemment qu’il n’en restait plus pour le sixième. En plein été 1944, la vermine ne tarda pas à déclencher une épidémie très meurtrière de typhus exanthématique.
A la fin d’août et au début de septembre 1944, chaque nuit, de nombreuses Françaises ont été exécutées dans l’antichambre du crématoire de Natzweiller, exécutions scientifiques par injections intraveineuses de chloroforme… Les hommes, moins favorisés, étaient pendus.