Le bonheur, c’est se construire avec les autres.

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La différence, une richesse.

1. Une histoire fantastique à en perdre la tête.

Je reçus un jour l’invitation d’un ami à lui rendre visite dans un pays lointain où il avait émigré mystérieusement sans motif et sans laisser d’adresse. Sa lettre était écrite d’une main nerveuse comme s’il appelait au secours sans trouver les mots pour le dire. « Cher ami, écrivait-il, venez me voir, je vous en prie. Tout est bien ici, tout est en ordre. Vous serez bien reçu. De grâce, pour l’amour de Dieu, venez. Je vous en aurai une infinie reconnaissance ».

La lettre n’était pas signée à la main. Il y avait simplement un cachet comportant le nom et l’adresse :            Monsieur Georges Morisson

                                   Downstreet 333

                                   Nevercity HOOLILAND

J’en fus étonné, car je ne connaissais pas ce pays. Il me fallut consulter un laboratoire de recherche géographique pour apprendre qu’il s’agissait d’une petite île indépendante du côté du pôle sud, jadis désertique et récemment colonisée par une population cosmopolite en quête d’aventure.

Comme l’aventure ne me déplaisait pas, je décidai de partir. Ce fut par avion jusqu’à l’extrême pointe sud de l’Amérique Latine et enfin par bateau que, par chance, je réussis à prendre, car m’a-t-on dit, les traversées ne s’effectuaient qu’une fois par an.

J’arrivai sur cette île cinq fois plus petite environ que l’île de Malte. Le Bateau en fit le tour et accosta dans un petit port autour duquel s’étendait Nevercity, l’unique ville du lieu. Il faisait froid et tous les habitants portaient une espèce de cagoule derrière laquelle se cachaient les visages. Un fonctionnaire du poste de garde m’interrogea sur les raisons de ma visite. Après deux heures d’attente, on me laissa enfin passer en m’enjoignant, malgré mes réticences, d’enfiler ladite cagoule.

La ville était quadrillée par des rues perpendiculaires et parallèles. Le trafic était intense ; pas de voiture mais uniquement de grosses motos. Le vrombissement des moteurs multiplié par l’écho que renvoyaient de hautes façades, me faisait trembler tout entier. Les pilotes tout habillés de cuir portaient un casque intégral noir à visière fumée. Je demandai à l’un d’eux la direction de Downstreet. Il semblait me regarder, mais je ne pouvais discerner la direction de son regard sous la visière fumée. Il parut étonné par ma question et me fit un geste nonchalant vers la gauche, puis vers la droite. Je fis semblant de comprendre et m’engageai vers la droite jusqu’au premier carrefour.

Avec surprise, je vis que les quatre rues du carrefour étaient nommées Downstreet. Je continuai, me fiant au hasard, jusqu’au deuxième, troisième et quatrième carrefour. Toutes les rues étaient des Downstreet… Sans doute, me disais-je, dois-je simplement repérer le numéro 333. Quelle chance ! Je me trouvais précisément à côté du numéro 333 sans l’avoir cherché. Heureux d’être finalement parvenu à la bonne adresse, pour reprendre quelque peu mes esprits et me disposer à revoir mon ami, je fis le tour du pâté de maisons. Mais stupéfaction… tous les numéros étaient identiques ! Partout des 333… Je croyais perdre la tête. Je m’approchai avec angoisse d’une porte choisie au hasard. Il y avait une vingtaine de sonnettes et, chaque fois, … le nom de Morisson.

Peut-être, me disais-je, le prénom de tous ces Morisson, allait-il au moins être différent ? Je sonnai au hasard. Et une voix dont je ne pouvais distinguer si elle était celle d’un homme ou d’une femme, me dit au parlophone :

« Allo » – « Etes-vous Monsieur Georges Morisson ? » dis-je. – « Oui, c’est bien moi », me répondit la voix. En vitesse, je traversai la rue et sonnai, une fois, dix fois, à une autre porte, à une autre sonnette. « Etes-vous Monsieur Georges Morisson ? » Et toujours la même réponse : « Oui, que me voulez-vous ? »

– « Ouvrez-moi, je vous prie, j’ai à vous parler ! »

– « Bien, entrez »

Un personnage tout encagoulé m’attendait sur le septième palier. Il me fit entrer dans une pièce carrée sans décoration ni couleur. « Que désirez-vous ? », me dit-il. Immédiatement, je lui fis part de mon extrême perplexité, implorant quelques mots d’explication. « Mais, enfin, lui dis-je, est-ce bien vous qui m’avez fait parvenir cette lettre avec cette adresse ? » Il me regardait à la fois fixement et distraitement comme s’il était en train de fouiller sa mémoire pour se souvenir, pour se rappeler. « C’est possible, me dit-il d’une voix neutre. Je ne me souviens pas. Sachez que la première chose que vous abandonnez à Nevercity, c’est la mémoire et, d’abord, la mémoire des noms. On devient ainsi indifférents les uns aux autres, indifférents les uns des autres, interchangeables, si vous voulez, comme des fourmis ressemblent point par point à d’autres fourmis… »

Sans plus attendre, je fis demi-tour et précipitamment, je me dirigeai vers la porte de sortie.

– « Monsieur Morisson, implora-t-il, attendez donc… attendez-moi… »

Allai-je répondre à l’appel de ce nom ? J’hésitai un moment et revins vers lui…

A) Soulignez dans cette histoire trois mots ou phrases qui vous ont choqué ou que vous avez apprécié. B) Numérotez-les dans la marge. C) Expliquez brièvement votre choix.


D) Pourquoi, à ton avis, l’ami a-t-il envoyé cette lettre d’invitation ?


E) Cette vie dans cette histoire fantastique semble-t-elle agréable ?


F) Le fait que dans la vraie vie, les gens soient différents, est-ce un avantage ou un inconvénient ?


G) Explique en 5 lignes, cette affirmation : « Si tu me ressembles, tu m’appauvris, si tu es différent de moi, tu m’enrichis ».


Conclusion