Combattre le mal

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Document 6 : Les invités de Conrad, Tolstoï.

Il y avait jadis, dans une bourgade de Russie, un cordonnier qui s’appelait Conrad. C’était un homme de Dieu. Une nuit, il rêva que le Christ viendrait le lendemain dans son échoppe.

Il se leva plus tôt, ce matin-là, et s’en fut dans la forêt couper des rameaux verts pour décorer sa boutique. Il attendit toute la matinée, mais son seul visiteur fut un vieil homme qui demanda à pouvoir se reposer.

Conrad le fit entrer et remarquant ses souliers usés lui dit : « Je vous donnerai une autre paire. » Et, il passa au vieillard une belle paire de souliers neufs.

Il patienta tout l’après-midi mais ne reçut qu’une pauvresse, qui ployait sous une lourde charge de fagots. La femme était très fatiguée. Conrad en eut pitié, la fit entrer et lui servit le repas qu’il avait préparé pour le Seigneur. Elle mangea, puis réconfortée, se remit en route.

Tandis que les ombres de la nuit commençaient à descendre, voici qu’un enfant perdu, tout en larmes, vint supplier le cordonnier de le ramener chez lui, de l’autre côté du bourg. « J’attends quelqu’un, lui dit le cordonnier, mais je vais tout de même t’accompagner rapidement. » A son retour, Conrad était convaincu qu’il avait manqué le Seigneur.

Il imaginait la scène qu’il avait espéré vivre : le coup à la porte, le verrou tiré, le visage illuminé, la coupe offerte. Il aurait baisé les mains à la place des clous. Le Seigneur se serait assis et aurait rompu le pain avec lui comme avec les disciples d’Emmaüs.

Soudain, Conrad attristé s’exclama : « Pourquoi, Seigneur, n’es-tu pas venu ? As-tu oublié que c’était aujourd’hui ? » Alors, doucement, dans le silence, il entendit une voix : « Ne sois pas triste, j’ai tenu parole. Trois fois je suis venu frapper à ta porte amicale. J’étais le mendiant aux pieds meurtris, cette femme à qui tu as donné à manger et l’enfant perdu que tu as ramené chez lui. Ne m’as-tu pas reconnu ? »